TITRE V :

DES RAPPORTS ENTRE LE POUVOIR EXÉCUTIF ET LE POUVOIR LÉGISLATIF

Analyse du TITRE V du Projet de Constitution

Le Titre V du Projet de Constitution régit les rapports entre le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif, en délimitant les champs d'application de la loi et du règlement. Les matières essentielles à l’organisation de la société, notamment les droits fondamentaux des citoyens, la nationalité, les régimes matrimoniaux et successoraux, ou encore l’organisation de la justice, relèvent du domaine législatif. La loi encadre également des secteurs spécifiques tels que l’information, le numérique et la protection des données personnelles pour garantir l’intimité des citoyens. Par ailleurs, elle régit le système électoral, le statut des magistrats, les partis politiques, et les finances publiques. Tout ce qui ne relève pas de la loi est de l'ordre du règlement.

Les projets et propositions de loi peuvent être déposés dans l’une ou l’autre chambre, selon le type de projet, où ils sont discutés et amendés. En cas de désaccord après une première lecture, une commission mixte paritaire est chargée de proposer un texte de compromis. Si la commission échoue, l’Assemblée nationale statue en dernier ressort, à l’exception des textes relatifs aux collectivités locales et à la Constitution.

Les ressources et charges de l’État doivent être intégralement évaluées dans le projet de loi de finances, que le Gouvernement soumet chaque année au Parlement. Si le budget n’est pas adopté avant la fin de la session parlementaire, le Président peut provisoirement reconduire le budget précédent par ordonnance. En cas d’absence persistante de vote, le Président peut établir le budget par ordonnance spéciale. Par la suite, la Cour des Comptes examine l’exécution des lois de finances et remet un rapport au Parlement.

Pendant l’intersession parlementaire, le Président, après avis du Conseil d’État, peut légiférer par ordonnance sur des domaines normalement réservés à la loi. Ces ordonnances, toutefois, doivent être ratifiées par le Parlement pour devenir permanentes, sans quoi elles deviennent caduques. En cas de dissolution de l’Assemblée nationale ou d’impossibilité de se réunir, le Sénat peut adopter des textes législatifs nécessaires à la conduite de la politique nationale, textes qui sont soumis pour réexamen à la nouvelle Assemblée lors de sa première session.

Enfin, les projets de lois organiques, qui précisent le fonctionnement d'institutions, sont soumis à une procédure renforcée : après adoption par le Parlement, ils doivent être validés par la Cour Constitutionnelle avant leur promulgation. Ce rôle conféré à la Cour Constitutionnelle permet de garantir le respect de la Constitution et d’assurer un équilibre entre l’exécutif et le législatif par des mécanismes de contre-pouvoirs.

Avis de la Rédaction Article241

À la lecture de ce Titre V, plusieurs points d’attention ressortent quant à l’équilibre des pouvoirs et la transparence du processus législatif.

Le premier concerne la concentration des pouvoirs de l’Exécutif dans la législation. En effet, le Président de la République a la capacité d’intervenir par ordonnances sur des sujets législatifs pendant l’intersession parlementaire ou en cas d’urgence. Il peut par exemple établir un budget par ordonnance spéciale si le Parlement n’adopte pas la loi de finances en temps voulu. Le fait de recourir à des ordonnances, particulièrement en matière budgétaire, réduit le principe de transparence et étouffe le débat démocratique. Bien que le mécanisme des ordonnances dans ces contextes définis vise à garantir la continuité de l’État, il pourrait limiter le contrôle parlementaire et affaiblir le rôle du pouvoir législatif.

De plus, ce qui relève du règlement, c’est-à-dire tout ce qui n’est pas explicitement attribué à la compétence de la loi, reste trop vaste selon nous. Cette sorte de flou confère au pouvoir exécutif une marge de manœuvre notable pour établir des règles dans des secteurs et domaines divers sans qu’un contrôle du Parlement ne puisse se faire.

Par ailleurs, nous pensons qu’une attention particulière doit être apportée à la rédaction de la Loi des Finances par le Gouvernement, son examen par l’Assemblée Nationale et sa validation par la Cour des Comptes. L’Exécutif est dans l’obligation de respecter les délais de dépôt du document, tout comme les Députés ont l’obligation de l’examiner dans un délai suffisamment long pour en comprendre toutes les nuances, mais suffisamment court pour ne pas impacter le fonctionnement courant des affaires publiques.

Enfin, bien que la Cour des Comptes et la Cour Constitutionnelle soient impliquées dans la vérification des lois de finances et des lois organiques, il est crucial de renforcer leur indépendance et leur capacité à imposer un contrôle efficace, pour éviter toute emprise excessive de l’exécutif sur ces institutions de régulation.

Nous espérons que le Gouvernement et les institutions concernées sauront apporter les réponses à ces interrogations pendant la période de propagande référendaire.