LIVRE I, TITRE X :
Les articles 112 à 166
Analyse du TITRE X du Code Électoral
Les dispositions du Titre X du Livre I du nouveau Code Electoral portent sur les différentes étapes de l’organisation et du déroulement des opérations de vote en République Gabonaise.
Ces opérations de vote sont prévues pour intervenir au cours des scrutins et référendums au titre desquels les électeurs gabonais sont convoqués afin d’élire leurs représentants ou se prononcer sur une question soumise par voie référendaire.
Les nouveaux textes légaux en vigueur couvrent ainsi différents points relatifs aux opérations de vote réalisées en République Gabonaise comme suit :
S’agissant du calendrier de convocation du collège électoral (1er chapitre) :
Conformément aux dispositions de l’article 112, les élections se déroulent en principe le samedi, sauf si ce jour coïncide avec une fête légale, ou une circonstance exceptionnelle empêche la tenue du scrutin ce jour. Le cas échéant, le vote peut être reporté le lendemain (c’est-à-dire dimanche), ou un autre jour déclaré pour la circonstance férié et chômé sur toute l’étendue du territoire national, ou dans la circonscription concernée.
Le ministre de l’Intérieur fixe ainsi la date de convocation des électeurs, laquelle doit être publiée au moins dix jours avant le scrutin. Sachant qu’en cas de force majeure, la Cour Constitutionnelle peut en tout état de cause reporter l'élection (article 113).
En ce qui concerne la détermination, la composition et l’organisation des bureaux de vote (2ème chapitre) :
De manière générale, les bureaux de vote doivent être constitués par les autorités compétentes dans des bâtiments publics (par exemple, les établissements d’enseignement, les établissements pénitentiaires, les corps de garde en zone rurale, etc.), et ils doivent être accessibles aux personnes à mobilité réduite (article 114).
Chaque bureau de vote est dirigé par un président, deux vice-présidents et deux assesseurs, choisis parmi des personnes formées en matière électorale. Les candidats ou listes de candidats sont représentés chacun par un électeur désigné par eux. Ces représentants dont les identités sont relevées avant l’ouverture du scrutin doivent (1) être munis d’un mandat écrit et (2) ne sont pas membres du bureau de vote (article 115).
L'urne électorale doit être transparente, numérotée et ouverte avant le scrutin. Les électeurs doivent en outre signer une liste d'émargement et y marquer un de leurs doigts à l'encre indélébile (article 119).
Le vote a lieu sous enveloppe accolée non transparente comportant deux (2) compartiments :
Un (1) compartiment de couleur blanche portant la mention « vote » sert au choix du bulletin de vote du candidat pour lequel l'électeur souhaite voter ;
Et l'autre compartiment de couleur noire, portant la mention « poubelle », est destiné à recueillir les autres bulletins de vote relatifs aux candidats pour lesquels l’électeur ne souhaite pas voter (article 121).
Concernant l’observation et l’organisation des opérations électorales (3ème et 4ème chapitres) :
Des observateurs nationaux et internationaux peuvent être accrédités afin de surveiller le déroulement du processus électoral. Le cas échéant, ils doivent agir de manière indépendante et impartiale (articles 124 à 129).
Le scrutin, qui se déroule sur un (1) jour, est en principe ouvert à 7 heures et clos à 18 heures – avec des dispositions prévues afin de pouvoir prolonger ou avancer l'heure de clôture des bureaux de vote. La sécurité et l’intégrité de chaque bureau sont assurées par son président, lequel peut en expulser les perturbateurs (articles 130 à 139).
En ce qui concerne l’exercice du droit de vote par l’électeur (les modalités du vote par procuration incluses –5ème et 6ème chapitres) :
Seules les personnes inscrites sur la liste électorale et porteuses d’une carte d’électeur, d’une carte nationale d’identité ou d’un passeport peuvent voter (article 140) – à l’exception des personnes frappées de déchéance de leur droit de vote, même si elles n’ont pas encore été radiées de la liste électorale (article 141).
Sachant que, en cas de perte de la carte d’électeur, l’électeur inscrit n’est admis à voter qu’après vérification de son inscription sur les listes électorales.
Le vote est libre et secret, et doit se faire dans un isoloir. Les électeurs peuvent être assistés à cet égard s'ils ont un handicap.
Un électeur peut enfin voter par procuration sous certaines conditions (article 146). Pour ce faire, le mandataire doit jouir de ses droits électoraux, être inscrit sur la liste électorale et résider dans la même commune ou le même département que le mandant (article 147).
Le mandataire ne peut disposer que d'un seul mandat (article 148), et ce document doit indiquer les noms, prénoms, dates et lieux de naissance, domiciles, circonscription électorale, numéros d’identifications personnelles du mandant et du mandataire (article 149).
S’agissant enfin, les opérations post-électorales et du recensement du vote (7ème et 8ème chapitres) :
Après le vote, le dépouillement est public et doit être effectué sans interruption (article 152).
A la suite du dépouillement, sont comptabilisés comme étant nuls :
Les bulletins sur lesquels le votant s'est fait connaître ;
Les bulletins trouvés sans enveloppe ou dans des enveloppes non réglementaires ;
Les bulletins ou enveloppes portant des mentions injurieuses pour le candidat ou pour les tiers ;
Les bulletins multiples et contradictoires placés dans un même compartiment de l’enveloppe accolée ;
Les bulletins sur lesquels le nom d'un ou plusieurs candidats a été rayé ou ajouté.
Lors du dépouillement, si le décompte des bulletins contenus dans le compartiment portant la mention « poubelle » est conforme au nombre des candidats en compétition moins un, le vote de l'électeur est validé.
Si le décompte fait apparaître des bulletins manquants dans le compartiment portant la mention « poubelle » le vote de l'électeur est annulé.
Les résultats sont annoncés immédiatement, et des procès-verbaux sont rédigés (article 155).
Les commissions électorales locales sont responsables du recensement des votes et de la centralisation des résultats (article 157). Les résultats sont transmis aux autorités compétentes (à la suite de leur convoyage assuré par les services des ministère de l’Intérieur et de la Défense – Article 166) et affichés publiquement, sachant que le ministre de l’Intérieur annonce publiquement les résultats obtenus sur l’ensemble du territoire, depuis le siège de son Ministère.
Avis de la Rédaction Article241
L’ensemble de ces précisions légales sont les bienvenues, notamment à un peu plus de deux mois des échéances présidentielles qui ont vocation à mettre un terme à la période de transition entamée depuis le 30 août 2023.
De notre point de vue, il ressort aussi bien des avantages que des inconvénients des différentes dispositions légales détaillées ci-dessus comme suit :
S’agissant du calendrier de convocation du collège électoral (1er chapitre) :
La possibilité laissée par les dispositions légales du Code Électoral de déterminer un autre jour que le samedi afin d’appeler les électeurs à voter, permet d’avoir de la flexibilité dans le choix de la date des élections. Il est ainsi possible pour les autorités de s’adapter à des circonstances imprévues, tout en garantissant que les opérations de vote puissent se dérouler dans des conditions optimales.
A l’inverse, un changement fréquent de la date de tenue des élections peut créer de la confusion dans l’esprit des électeurs et des différents acteurs du scrutin (lesquels pourraient craindre un risque de manipulation politique, dès lors que les dates sont modifiées sans justification claire).
En ce qui concerne l’échéance électorale présidentielle à venir : les autorités ont ainsi annoncé que le scrutin devrait en principe se tenir le samedi 12 avril 2025.
En ce qui concerne la détermination, la composition et l’organisation des bureaux de vote (2ème chapitre) :
Les dispositions légales devraient permettre d’assurer une localisation accessible et appropriée des bureaux de vote pour l’ensemble des électeurs (y compris pour les personnes à mobilité réduite, ou en situation de handicap).
Cela dit, la sélection des lieux de vote pourrait être contestée, notamment si elle implique pour certains électeurs de parcourir de longues distances pour accomplir leur devoir de citoyen. Le cas échéant, cela pourrait également nécessiter des moyens supplémentaires afin de garantir la bonne accessibilité des électeurs concernés aux lieux de vote.
L’intégration des représentants des candidats dans les bureaux de vote permet enfin de renforcer la transparence du processus électoral (bien qu’une désignation « partisane » des membres des bureaux de vote pourrait compromettre l'impartialité de ces derniers au moment du suivi du bon déroulement du scrutin).
D’où la nécessité de désigner en qualité de membres des bureaux de vote, des personnes ayant effectivement suivi une formation en matière électorale.
En ce qui concerne les modalités de vote par les électeurs, la structure opaque de l'enveloppe accolée qui est mise à leur disposition semble assurer un vote organisé et secret.
Toutefois, l’obligation de remplir le compartiment de couleur noire avec l’ensemble des bulletins des candidats pour lesquels un électeur ne souhaite pas voter (en sus du compartiment de couleur blanche complété avec le bulletin du candidat pour lequel l’électeur a voté) comme pré-requis de la validité du vote, pourrait conduire à un nombre significatif de votes comptabilisés comme étant nuls.
Afin d’éviter de voir son vote déclaré comme étant nul, il est par conséquent impératif pour chaque électeur de bien veiller à remplir les bons compartiments de couleur blanche (avec le bulletin du candidat pour lequel il a voté) et noire (avec les bulletins des candidats qui n’ont pas été plébiscités).
À la lumière de ces contraintes qui paraissent plus qu’évidentes et qui pourraient à terme biaiser un scrutin électoral, l’idéal aurait été peut-être de circonscrire la validité d’un vote au remplissage par l’électeur d’une enveloppe avec le bulletin du candidat pour lequel il souhaite voter.
Concernant l’observation et l’organisation des opérations électorales (3ème et 4ème chapitres) :
L’accréditation d’observateurs nationaux et internationaux favorise la transparence et la confiance des électeurs et de l’ensemble des acteurs dans le processus électoral. Cela dit, leur présence peut entraîner des tensions si les observateurs sont perçus comme étant biaisés (d’où la nécessité de s’assurer sur la base d’éléments purement objectifs de l’impartialité d’un observateur, en amont de la délivrance d’une accréditation).
L’ouverture du scrutin sur une plage horaire claire facilite sa planification (c’est-à-dire entre 7 heures et 18 heures, en principe). Les autorités compétentes doivent ainsi faire le nécessaire pour permettre à chaque citoyen d’exercer son droit de vote en toute sérénité.
La possibilité accordée aux représentants des candidats de suivre les opérations de vote, ainsi que la signature par tous les membres du bureau de vote du procès-verbal et de la liste d'émargement qui en résultent (ainsi que leur remise aux représentants des candidats) sont autant de gages de sincérité du scrutin.
En ce qui concerne l’exercice du droit de vote par l’électeur (les modalités du vote par procuration incluses – 5ème et 6ème chapitres) :
Les dispositions légales en vigueur permettent d’assurer aux électeurs dûment inscrits sur des listes électorales (et disposant en outre de leur carte d’électeur, de leur carte nationale d’identité ou de leur passeport) l’exercice entier de leur droit de vote, renforçant ainsi l'intégrité du processus électoral.
Dans ce contexte, il convient de noter que les électeurs qui ne disposent pas d’un des documents visés ci-dessus (et qui ne sont en tout état de cause pas en mesure de permettre la vérification de leur inscription conforme sur les listes électorales) peuvent être légitimement empêchés de voter.
La mise à disposition importante des formulaires de procuration par le ministère de l’Intérieur (avec des informations claires s’agissant de leur contenu) facilite l’accès des électeurs à ces documents, et pourrait ainsi avoir pour effet d’augmenter la participation des électeurs aux scrutins de manière significative.
En espérant que les autorités compétentes prendront toujours toutes les dispositions afin que les formulaires correspondants soient disponibles dans les délais.
S’agissant enfin, les opérations post-électorales et du recensement du vote (7ème et 8ème chapitres) :
L’ouverture publique de l’urne par le Président du bureau de vote à la suite de la clôture du scrutin assure la transparence du processus de dépouillement. Cela pourrait toutefois être source de tensions si des erreurs venaient à être découvertes au cours du comptage.
La confirmation du recensement local des résultats électoraux et de leur annonce par les autorités locales renforce quant à elle la transparence du scrutin électoral.
L’aménagement du cadre et la fourniture des personnels des ministères de l’Intérieur et de la Défense Nationale pour les besoins du convoyage, de la centralisation et de l'affichage des résultats du scrutin, permettent enfin de sécuriser pleinement le dernier maillon du processus électoral.
Soit autant de mesures relatives aux opérations de vote qui, bien que perfectibles pour certaines, ont le mérite de permettre de garantir la sincérité, l’intégrité et la crédibilité d’élections libres en République Gabonaise.