LIVRE I, TITRE IX :

Les articles 104 à 111

Analyse du TITRE IX du Code Électoral

Le nouveau Code Électoral encadre le financement des campagnes électorales, le plafonnement des dépenses et la gestion des comptes de campagne afin d'assurer une transparence financière et une égalité entre les candidats.

Il précise les sources de financement autorisées pour les candidats. Seules les personnes physiques de nationalité gabonaise peuvent apporter un soutien financier sous forme de dons ou de legs (Article 105).

Les personnes morales, à l'exception des partis politiques et des établissements de crédits locaux, ne sont pas autorisées à financer un candidat. Toute aide sous forme de biens ou services à tarif préférentiel est également interdite (Article 106).

Tout financement étranger est strictement prohibé afin de préserver l’indépendance du processus électoral (Article 107). Afin d'éviter des déséquilibres entre candidats, un plafond des dépenses électorales est défini selon le type d’élection (Article 108) :

  • 50 millions de FCFA pour les élections locales.

  • 30 millions de FCFA pour les élections sénatoriales.

  • 100 millions de FCFA pour les élections législatives.

  • 10 milliards de FCFA pour l’élection présidentielle.

En cas de second tour, ces montants sont ajustés en conséquence.

Chaque candidat doit également déclarer un compte prévisionnel de campagne, détaillant les ressources et dépenses estimées, et le déposer 14 jours avant le scrutin auprès de la Cour des Comptes ou de la Chambre provinciale des Comptes compétente (Article 109).

Afin de garantir une transparence financière et une traçabilité des fonds électoraux, le Code Électoral impose la désignation obligatoire d’un mandataire financier chargé de gérer les fonds de campagne (Article 110) ainsi que la transmission des comptes de campagne aux autorités compétentes dans les délais prescrits afin de permettre un contrôle rigoureux (Article 111).

Ces mesures visent à prévenir les irrégularités financières et à assurer une gestion électorale équitable pour tous les candidats.

Avis de la Rédaction Article241

Le nouveau Code Électoral vise à renforcer la transparence du processus électoral, à encadrer le financement des campagnes et à garantir une égalité entre les candidats. Cependant, certaines dispositions posent question quant à leur mise en œuvre effective, leur cohérence normative et leur capacité à prévenir d’éventuels abus.

Le rôle des établissements de crédit locaux : un risque de déséquilibre ?

L’article 106 dispose que les personnes morales ne sont pas autorisées à financer un candidat, à l’exception des partis politiques et des établissements de crédit locaux. De plus, toute aide sous forme de biens ou services à un tarif préférentiel est prohibée.

Dans l’absolu, cette disposition vise à préserver l’indépendance des campagnes électorales en limitant les influences extérieures. Toutefois, en autorisant les établissements bancaires nationaux à participer au financement électoral, une asymétrie concurrentielle pourrait émerger. En effet, certaines institutions financières entretenant des liens privilégiés avec le pouvoir en place pourraient favoriser certains candidats en facilitant l’accès aux ressources financières.

En vertu du principe d’équité, il conviendrait d’uniformiser les règles en interdisant tout soutien financier direct de la part des banques, qu'elles soient nationales ou internationales.

La nécessité d’un mécanisme de justification des fonds de campagne

Afin d’assurer une traçabilité financière, il est essentiel de connaître l’origine des financements de campagne, les montants collectés, ainsi que l’identité des contributeurs. Ces éléments sont des piliers de la transparence électorale et conditionnent la crédibilité du scrutin.

Toutefois, la question demeure : Existe-t-il un mécanisme de justification détaillé des fonds ? L’absence d’un dispositif clair de reporting et de contrôle des flux financiers risque de fragiliser l’intégrité du processus électoral et d’ouvrir la porte à des pratiques de financement occultes.

Sanctions en cas de dépassement des plafonds de dépenses : une lacune juridique ?

L’article 111 prévoit l’obligation pour chaque candidat de déclarer un compte prévisionnel de campagne et de respecter un plafonnement des dépenses. Cette mesure est essentielle pour garantir un équilibre des ressources entre candidats.

Cependant, la question centrale reste celle des sanctions en cas de non-respect de cette règle. Si un candidat dépasse le plafond autorisé, quelles seront les conséquences ? En cas de dépassement avéré, le candidat sera-t-il sanctionné financièrement ou déclaré inéligible ? Si un candidat ayant enfreint ces règles remporte l’élection, celle-ci pourra-t-elle être annulée ?

Le silence du texte sur ces points essentiels soulève une insécurité juridique qui pourrait compromettre l’effectivité du principe de fair-play électoral et porter atteinte à la légitimité du scrutin.

Si le nouveau Code Électoral introduit des avancées notables en matière de contrôle du financement des campagnes, il demeure perfectible. L’absence de sanctions clairement définies et le rôle des établissements de crédit locaux dans le financement électoral posent des questions majeures sur l’équité du processus.

Une clarification des dispositifs de contrôle ainsi qu’une définition précise des sanctions en cas de non-respect des plafonds de dépenses s’avèrent indispensables pour garantir l’intégrité et la crédibilité des élections.